<img href="https://www.epochtimes.fr/assets/uploads/2025/09/ambassadeur-CHine-795x447.jpeg" /><img href="" /><br><br><strong>La 7e édition des Rencontres des entrepreneurs de France (REF), organisée mercredi et jeudi dernier à Paris, s’est ouverte par une table ronde consacrée au libre-échange, sur fond de guerre commerciale sino-américaine. Invité par le Medef, l’ambassadeur de Chine en France a plaidé pour une défense du multilatéralisme aux côtés de l’Union européenne et à « lutter contre le renfermement sur soi ». « Que pouvons-nous faire avec nos amis chinois face au mur américain ? », a demandé le directeur de la rédaction des <em>Échos</em>. Le ministre délégué au Commerce extérieur a proposé « davantage d’investissements chinois ciblés », reprenant ainsi l’esprit des propositions controversées adressées à Emmanuel Macron vendredi dernier par plusieurs économistes français et allemands.</strong><br><br>L’édition 2025 de la Rencontre des entrepreneurs de France (REF), organisée la semaine dernière par le Medef, s’est tenue dans une ambiance morose, dominée par l’incertitude et l’angoisse face à une conjoncture économique toujours plus dégradée.<br><br>Dans son discours d’ouverture, le patron des patrons, Patrick Martin, s’est alarmé de la situation « très préoccupante », parfois même « critique », de certains secteurs commerciaux. Les entreprises françaises, a-t-il dénoncé, ploient sous le « niveau de taxation le plus élevé au monde », des contraintes réglementaires pesantes, et « une concurrence internationale toujours plus virulente, de plus en plus déloyale et même dérégulée ». Et de marteler : « Nous ne pouvons pas rester enfermés entre les mâchoires carnassières de la Chine et des États-Unis ».<br><br><strong>Pékin, « nouveau champion du libre-échange » pour le Medef</strong><br><br>Dans ce climat lourd, la REF a ouvert ses débats avec une table ronde consacrée au commerce international, et spécifiquement au libre-échange sous la « pression des tensions sino-américaines ». Sur le site officiel de l’événement, le ton était donné : « Les décisions de la nouvelle administration Trump, adoptées sans concertation […] accélèrent l’affaiblissement du multilatéralisme et favorisent les négociations de puissance à puissance. »<br><br>Le <a href="https://laref.org/2025/07/03/le-libre-echange-est-mort-vive-le-libre-echange/">texte</a>, empreint d’inquiétude face à la « nouvelle série de droits de douane exorbitants, au nom d’America First », n’hésite pas à présenter Pékin comme le « nouveau champion du libre-échange » et le « sauveur de la mondialisation ».<br><br>« Il y a dix ans à peine, la Chine était encore l’épouvantail du commerce mondial, accusée de dumping, d’entorses à la propriété intellectuelle et de subventions massives à ses entreprises d’État. Que de chemin parcouru ! », s’enthousiasme le Medef, avant de poser la question qui fâche : « Faut-il plier et négocier, riposter avec la Chine, ou inventer une troisième voie et, si oui, laquelle ? »<br><br>Pour cet échange, l’organisation patronale a convié non moins que l’ambassadeur de Chine en France, Deng Li. Seul représentant étranger de tout le programme, il a été placé au centre de l’attention. « L’ambassadeur américain est déjà venu de nombreuses fois à la REF ; inviter l’ambassadeur de Chine, c’était une nouveauté. Il n’y a pas d’autre raison », justifie une source interne au Medef, interrogée par <em>Epoch Times</em> sur l’absence de contradicteur américain. L’ambassadeur de l’époque, Lu Shaye, avait toutefois déjà pris part aux débats. Des représentants des États-Unis ont été invités à assister à l’évènement, mais sans intervenir dans les panels, nous indique une source diplomatique américaine.<br><br>Face à un parterre de chefs d’entreprise rassemblés dans les tribunes du stade Roland-Garros, Deng Li a exhorté « la Chine et l’Europe à défendre ensemble le libre-échange et le multilatéralisme, avec l’OMC en son cœur », appelant à « rejeter l’unilatéralisme et le protectionnisme » pour « lutter contre le renfermement sur soi ». Une pique à peine voilée contre Washington.<br><br>Pour le représentant chinois, « avec des chaînes de valeur intégrées, on ne peut se passer du libre-échange pour faire fonctionner correctement l'économie moderne. » « Le libre-échange n’est pas mort. Le monde en a besoin. »<br><br><strong>Les aides d’État chinoises au cœur du débat</strong><br><br>Cependant, côté américain, la remise en cause du libre-échange tient aussi au fait que la Chine est régulièrement accusée de subventionner massivement ses industries, provoquant des distorsions de concurrence. Prié par Christophe Jakubyszyn, directeur de la rédaction des <em>Échos</em>, de s’expliquer sur cette épineuse question, Deng Li a balayé les critiques d’un revers de main.<br><br>Selon lui, il s’agit d’une « pratique un peu généralisée », présente aussi bien en Chine qu’au sein de l’Union européenne, et qui ne contrevient pas aux règles de l’OMC : « Prenons l’exemple du véhicule électrique. Les subventions vont d’abord vers la recherche, puis la consommation [intérieure], pas à l’exportation. Et fin 2022, nous avons annulé la subvention à la consommation. Car aujourd’hui, les voitures électriques chinoises sont assez compétitives pour aller sur le marché. »<br><br>Pour autant, l’Organisation mondiale du commerce (OMC), dans un rapport publié en juillet 2024 sur la politique commerciale de la Chine, a non seulement confirmé l’existence de cette stratégie de subventions, mais surtout dénoncé l’opacité de Pékin quant au niveau réel du soutien financier accordé à plusieurs secteurs industriels, parmi lesquels l’aluminium, les véhicules électriques, le verre, la construction navale, les semi-conducteurs ou encore l’acier.<br><br>C’est ce qui avait aussi mené la Commission européenne à ouvrir en septembre 2023 une enquête sur les aides chinoises aux véhicules électriques, en raison de prix jugés « artificiellement bas ». Pékin avait alors dénoncé une mesure qui équivaut « ouvertement à du protectionnisme » et qui « aura un impact négatif sur les relations économiques et commerciales entre la Chine et l’Union européenne ».<br><br>Néanmoins, l’enquête avait été menée à son terme, et en octobre 2024, ses conclusions furent sans appel : l’UE a confirmé l’existence de subventions « déloyales » et imposé en conséquence des droits de douane ciblés. Depuis, de nouvelles enquêtes ont été lancées.<br><br>Toutefois, lors du sommet UE-Chine de juillet dernier, le Premier ministre Li Qiang a persisté, <a href="https://www.sudouest.fr/international/chine/sommet-ue-chine-le-premier-ministre-chinois-li-qiang-refute-les-accusations-de-subventions-massives-25365690.php">prétendant</a>, devant la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, que « la Chine ne pratique en aucun cas ce que certains appellent une politique de subventions ou des subventions fiscales ».<br><br>L'an dernier, le déficit commercial de l'UE avec la Chine s'est élevé à environ 360 milliards de dollars. Mais le Premier ministre chinois a également soutenu que ce déséquilibre n'est pas lié aux subventions publiques.<br><br>En 2024, une <a href="https://www.csis.org/blogs/trustee-china-hand/chinese-ev-dilemma-subsidized-yet-striking#:~:text=From%202009%20to%202023%2C%20we,just%20getting%20off%20the%20ground.">étude</a> du Center for Strategic and International Studies, un think tank américain, a néanmoins chiffré à près de 230 milliards de dollars (196 milliards d’euros) les fonds injectés par Pékin en moins de quinze ans pour soutenir son seul secteur des voitures électriques.<br><br><strong>« Nous avons été naïfs »</strong><br><br>Présent à la table ronde de la REF, Raúl Gutiérrez, président du conseil d’administration du groupe sidérurgique mexicain Deacero, n’a guère non plus goûté aux explications de l’ambassadeur chinois sur la politique de subventions de Pékin.<br><br>« Le problème est extrêmement grave : Pékin refuse toujours de reconnaître qu’elle continue à subventionner massivement non seulement son industrie de l’acier, mais une multitude de secteurs, en s’appuyant sur un capitalisme d’État qui fausse le marché mondial », a-t-il lancé. « On nous a vendu l’idée d’une compétition fondée sur des règles. Nous avons été naïfs d’y croire, car les grandes puissances ne les ont pas respectées, principalement la Chine ».<br><br>Pour appuyer ses propos, un chiffre frappant : « En l’an 2000, la Chine produisait environ 80 millions de tonnes d’acier. Vingt ans plus tard, sa capacité atteint 1,2 milliard de tonnes, soit 55 % de la production mondiale », a rappelé l’industriel. Dans son analyse, si les États-Unis de Donald Trump constituent aujourd’hui « une menace », c’est moins par rupture que par mimétisme : selon lui, les Américains cherchent à contourner des règles que la Chine elle-même ne respecte pas, dans l’idée de s’approprier, à leur tour, une part de la production manufacturière mondiale.<br><br>Invité à réagir, l’ambassadeur de Chine n’a pas nié l’existence des subventions, préférant relativiser : « 90 % de l’acier produit en Chine est vendu sur le marché intérieur », a-t-il affirmé, faisant valoir que seule une partie minoritaire de la production nationale, qu’il s’agisse d’acier ou de voitures électriques, était exportée à l’étranger.<br><br><strong>« Nous voulons davantage d’investissements chinois en Europe »</strong><br><br>À ses côtés, le ministre délégué au Commerce extérieur, Laurent Saint-Martin, s’est aussi exprimé sur l’état du libre-échange mondial face aux secousses du duel sino-américain. Pour l’homme politique, ce qui « a radicalement changé, et probablement pour la suite du siècle », c’est l’utilisation de « l'arme commerciale comme une arme géopolitique » par Donald Trump, qui « a réécrit le playbook, totalement ». En réaction, il estime qu’il « faut avoir une nouvelle voix européenne » en matière de défense du libre-échange, « que la France porte de façon trop isolée ».<br><br>Interrogé par le directeur des <em>Échos</em>, qui lui demandait : « Face à ce mur américain, qu’est-ce que nous pouvons faire avec nos amis chinois ? », le ministre a plaidé pour « davantage d’investissements chinois en Europe, mais des investissements ciblés, assortis de transferts de technologies et de véritables partenariats ». Avant de conclure : « C’est exactement l’agenda positif que nous devons bâtir entre l’Europe et la Chine pour les prochaines années. »<br><br>C’est aussi la proposition choc formulée par des économistes français et allemands et adressée à Emmanuel Macron ainsi qu’au chancelier Friedrich Merz dans des notes préparatoires au 25ᵉ conseil des ministres franco-allemand, tenu vendredi dernier à Toulon. L’objectif de cette rencontre visait notamment à tracer une feuille de route commune face au géant économique chinois.<br><br>Panneaux solaires, batteries, technologies « vertes », biotechnologies… Dans plusieurs secteurs qu’ils considèrent « perdus », ces universitaires appellent à ouvrir le marché européen aux produits chinois, à la condition d’obtenir en contrepartie des transferts de technologies.<br><br>Pour Jean Pisani-Ferry, économiste français et co-initiateur de la démarche, « il faut que les Chinois investissent sur le territoire européen et que la technologie chinoise serve à nous apprendre », <a href="https://www.bfmtv.com/economie/economie-social/union-europeenne/abandonner-les-secteurs-perdus-acces-au-marche-europeen-les-propositions-chocs-d-economistes-francais-et-allemands-face-a-l-industrie-chinoise_AV-202508290382.html">s’est-il avancé</a> sur BFM Business. Des propositions qui ont fait réagir l’économiste Philippe Herlin, lequel a dénoncé sur X l’attitude d’« économistes défaitistes […] incapables de comprendre les véritables causes de l’affaiblissement de l’Europe », pointant tour à tour « la bureaucratie bruxelloise », une fiscalité excessive, la transition écologique et l’étatisme.